Surprise, le 30 octobre 2010 France Bleu Isère annonçait que le projet de Center parcs Roybon était à l’arrêt ! Un coup de fil au siège de Pierre & Vacances permet de confirmer :
le projet est suspendu « tant que ne seront pas levées les incertitudes juridiques que les recours administratifs déposés par les opposants associatifs font peser sur le projet  ».
Il s’agit déjà d’un premier aveu. Les recours déposés il y a quelques jours par l’association « Pour les Chambaran Sans Center parcs  » inquiètent visiblement Pierre & Vacances. L’entreprise n’a plus l’air aussi sà »re du caractère irréprochable de son projet sur le plan légal.
Nul doute également que la mobilisation grandissante des opposants au projet commence à faire réfléchir la multinationale du tourisme : ainsi la popularité de l’association lors de la dernière foire de l’Albenc n’est par exemple pas passée inaperçue.
Toutefois, on sait que les recours administratifs, n’interdisent pas la poursuite des
projets car ils n’ont aucune valeur suspensive. Même un permis de construire annulé peut être immédiatement redéposé ; c’est ce qui s’est d’ailleurs passé avec le stade des Alpes à Grenoble dont les travaux n’ont jamais été retardés malgré les nombreux recours.
Nous le révélons aujourd’hui : deux nouveaux éléments justifient aujourd’hui la
suspension du projet de Center parcs à Roybon. Pierre & Vacances a visiblement oublié de communiqué à leur sujet.
Tout d’abord l’entreprise a découvert, plus que tardivement, qu’elle ne pourrait pas esquiver une des dispositions de la loi sur l’eau du 3 janvier 1992 qui vise à assurer la préservation des zones humides. Pourtant dans le protocole d’accord entre « le Département de l’Isère et Pierre et Vacances SA  » voté le 15 octobre 2009 par le Conseil général, on pouvait déjà lire :
Compte-tenu de l’importance des travaux envisagés et du milieu naturel dans lequel le projet s’inscrit, une autorisation au titre de la loi sur l’eau devra également être obtenue avant l’engagement des travaux. Ce dossier fera également l’objet d’une étude d’impact et d’une enquête publique. [...] Les zones humides qui seront impactées par l’implantation du Center parcs donneront lieu à des mesures compensatoires appropriées.
C’est la DDT Isère (Direction Départementale des Territoires) et la DREAL Rhône-Alpes (Direction Régionale de l’Environnement, de l’Aménagement et du Logement) qui veillent à ce que la destruction d’une zone humide soit compensée par la création de zones humides équivalentes au double de la surface impactée.
En l’occurrence Pierre & Vacances doit restaurer ou recréer 140 hectares de zones
humides, a priori en Isère (soit l’équivalent d’environ 300 terrains de football !). C’est une surface considérable et le temps nécessaire pour l’acquisition de ces parcelles (ou le conventionnement) auprès de multiples particuliers ne permettra pas un bouclage de l’enquête publique « Loi sur l’eau  » comme prévu à l’automne 2010.
D’ailleurs celle-ci n’a toujours pas commencé, preuve des grandes difficultés rencontrées par la multinationale.
Second élément, ce retard est très problématique pour Pierre & Vacances car le
gouvernement vient de décider de remettre en cause tout le système de défiscalisation sur lequel est entièrement adossée la viabilité économique des Center parcs.
La niche fiscale pratiquement taillée sur mesure pour Pierre & Vacances est le dispositif « loi Demessine  » permettant un remboursement de TVA (19,6%) sur un maximum de 100 000 euros et une réduction d’impôt de 25 000 euros sur 6 ans pour les investissements en Zone de Revitalisation Rurale (ZRR).
Les zones pouvant bénéficier du dispositif prévu par la loi Demessine sont publiées par décret. Surprise, il apparaît que dans le secteur dans lequel Pierre & Vacances cherchait à s’implanter (nord Drôme ou Bièvre Chambaran), seul le canton de Roybon est en ZRR.
Il y a donc fort à parier que la « concurrence  » qu’a soit disant fait jouer Pierre & Vacances entre l’Isère et la Drôme n’était que de façade : l’entreprise savait que son Center parcs ne pouvait s’implanter qu’à Roybon. Cette fausse « concurrence  » entre départements a, en fait, permis de négocier une forte aide du département de l’Isère (15 millions d’euros).
Au moment où le Conseil général a pour la première fois délibéré, le 13 juin 2008, seule la loi Demessine pouvait servir à défiscaliser l’achat d’un cottage. Mais entre temps, la crise a touché fortement le marché immobilier. Pour soutenir ce secteur, l’Etat a mis en place un nouveau dispositif, dit « loi Scellier  » en 2009.
Ce dispositif permet aux investisseurs immobiliser de bénéficier d’un abattement fiscal sous certaines conditions. Cet abattement était de 25% de la valeur du bien en 2010 plafonné à 300 000 euros (et non 100 000). Il était donc plus avantageux que le dispositif Demessine.
Or, le gouvernement vient d’annoncer une modification des taux d’abattement pour le
dispositif « Scellier  » dans les années à venir. Il devait baisser à 15% pour 2011. Aux
dernières nouvelles5, la baisse serait encore plus forte : 13,5% en 2011 et 9% en 2012.
Le dispositif « Demessine  » risque lui aussi d’être revu à la baisse de façon similaire.
Pierre & Vacances savait bien que le montage financier de ce dossier était lié aux délais de
ces avantages fiscaux. La délibération voté en juin 2008 par l’assemblée départementale est
d’ailleurs explicite : « Pour bénéficier des avantages fiscaux liés à la résidence de tourisme, Pierre-et-Vacances doit en effet avoir commercialisé les cottages avant le 31 décembre 2010, étant entendu que la majorité est vendue sur plans.  »
En conclusion, les incertitudes juridiques liées aux recours déposés et la mobilisation grandissante des opposants inquiètent les promoteurs du projet. Mais aujourd’hui c’est surtout la grande difficulté pour mettre en Å“uvre les « compensations  » environnementales et l’effondrement du modèle économique et fiscal du projet qui risquent, non pas de le suspendre, mais de l’arrêter définitivement.
Si cette décision est finalement prise par Pierre & Vacances, tous les emplois promis seront évidemment remis en cause. Les élus qui se sont engagés, têtes baissées, sur ce projet exploitant une niche fiscale immobilière, consommateur de grosses subventions publiques et contestable en terme de développement équilibré du territoire, devront expliquer toutes les raisons de cet arrêt aux populations locales.
Les écologistes souhaitent que les aides publiques promises par la commune, le
département et la région, soit réorientées pour créer de très nombreux emplois en
développant notamment une politique volontariste de tourisme « doux  » (parcours
sportifs, valorisation culturelle, hôtellerie, campings, chambres d’hôtes, gites ruraux,
gites à la ferme, ...) générant des activités économiques et sociales réellement au bénéfice des habitants de la Bièvre-Valloire et plus globalement de l’Isère.
Pour Europe Ecologie Les Verts de l’Isère,
Christine GARNIER, présidente des Verts de l’Isère
Pour le groupe des Verts de Beaurepaire,
Arnaud BOUCHENY, porte-parole
Pour les élus Verts du Conseil général de l’Isère,
Catherine BRETTE, présidente de groupe
Pour les élus du groupe « Europe Ecologie Les Verts  » du Conseil régional Rhône-Alpes, MARYVONNE BOILEAU, conseillère régionale membre du CDRA Bièvre-Valloire