Monsieur le président de Région
Madame, Monsieur le conseiller régional,
Dans le cadre des débats budgétaires prochains, vous allez être appelé(e) à vous prononcer sur le vote d’une autorisation de programme de 4,7 M€ au profit du projet de construction d’un « Center Parcs  » à Roybon, dans le massif des Chambaran.
Ce projet, qui consiste en une vaste opération immobilière de 1000 « cottages  » sur 200 ha de forêts et de zones humides sensibles, prévoit une base de loisirs aquatiques chauffée à 29 ° toute l’année, ainsi que des équipements et infrastructures techniques commerciales et hôtelières.
En raison des incohérences environnementales, économiques et financières qui ont été mises en lumière à chacune des étapes de son instruction, il suscite toujours la plus vive opposition de la part de nombreuses associations et collectifs.
Le site convoité par le groupe « Pierre et Vacances  » se trouve sur un territoire se trouvant en tête des bassins versants de l’Herbasse et de la Galaure, classés par le SDAGE en réservoirs biologiques, et faisant l’objet d’un contrat de rivière.
Les couches géologiques profondes du massif des Chambaran constituent un réservoir d’eau exceptionnel et fragile. De par sa situation géographique, et bien que situé en Isère, ce projet présente donc un risque majeur pour toute la Drôme des collines, qui n’a d’ailleurs pas été consultée.
Par ailleurs ce massif forestier est caractérisé par la présence de nombreuses zones humides abritant une flore et une faune caractéristiques, constituant un écosystème remarquable qui ne résisterait pas aux travaux de terrassement et d’infrastructures rendus nécessaires par l’implantation d’une ville de plus de 5 000 habitants en pleine saison.
Les nombreuses imprécisions et inexactitudes relevées dans l’étude préalable réalisée dans le cadre de la loi sur l’eau et les milieux aquatiques (LEMA) ont conduit la commission Loi sur l’eau à rendre, à l’issue de son enquête publique en juillet 2014, un avis défavorable au projet, avis délibérément ignoré par le préfet de l’Isère.
Le 16 juillet dernier, le tribunal administratif de Grenoble a annulé l’arrêté préfectoral relatif à la Loi sur l’eau du Center Parcs de Roybon.
Le Groupe « Pierre et Vacances  » a immédiatement fait appel de cette décision.
Dans le même temps, le groupe a intensifié sa campagne de marketing vantant un « concept  » de vacances familiales au sein de la nature : une nature reconstituée et artificielle issue de la destruction irréversible d’espaces naturels et d’espèces protégées faisant partie des communs.
Une nature aliénée au profit d’une structure privée qui promeut une forme de tourisme « hors sol  », déconnecté du territoire sur lequel il s’implante, dans le seul intérêt de survivre.
Car le groupe Pierre &Vacances ne doit son fonctionnement et sa survie qu’à la reconduction infinie de nouveaux programmes immobiliers. Achetée en 2003 par le groupe, la marque Center-Parcs est depuis le projet salvateur.
Le principe du Center Parcs consiste à vendre la plus grande quantité possible de « cottages  » (maisons bardées de bois) à des investisseurs grâce à l’attractivité d’une bulle tropicale.
Les investisseurs sont soit des particuliers qui se font payer une partie du bien grâce aux niches fiscales (votées spécifiquement pour les intérêts du groupe), soit des investisseurs institutionnels comme, par exemple, la caisse des dépôts et consignations.
Le but du groupe Pierre & Vacances est de faire un montage financier engageant le minimum de fonds propres, reportant ainsi tous les risques sur les investisseurs.
En résumé, le modèle économique du groupe, basé essentiellement sur les plus-values immobilières des nouveaux programmes et des rénovations, n’est viable qu’au prix d’un apport massif initial de fonds publics par les collectivités et l’État.
Sans ce favoritisme, contraire au droit fondamental européen de la concurrence, le groupe aurait depuis longtemps disparu.
De fait, dés lors que l’on prend en compte la somme des aides publiques allouées à cette opération, les retombées économiques nettes pour la région deviennent très discutables et personne jusqu’à présent ne s’y est aventuré : aucune retombée économique indépendante sérieuse n’a été présentée sur ce projet.
Alors que dans le même temps, pour un projet de Center Parcs dans le Lot, le conseil économique, social et environnemental régional (CESER Aquitaine) a émis, après débat intense, un avis très critique démontrant que ce projet de Center Parcs n’apporte aucune réelle plus-value à l’offre touristique.
L’argument de l’intérêt public impératif et majeur invoqué par le préfet de l’Isère dans son arrêté autorisant la destruction des espèces protégées, est un détournement de langage reposant sur le seul critère de la création d’emploi. Mais à quel prix social, environnemental et financier ? Doit-on vraiment tout accepter au titre de la création d’emploi ?
Même si, dans ces circonstances, nous souhaitons vivement que vous disiez « Non  » au vote de la subvention, l’invitation de ce courrier est d’abord d’aller par vous même dans le fonds du dossier :
Exposez ouvertement les problématiques qui y sont soulevées, examinez attentivement les réponses et agissez à partir de là , en conscience et en toute liberté.
La qualité d’une vraie démocratie repose sur cette exigence.
Je reste naturellement à votre disposition pour toute information complémentaire.
Marc Revol-Buisson
Président de l’assocation
« Pour les Chambaran Sans Center Parcs  »
marc.revol-buisson@wanadoo.fr
http://pcscp.org
Document original : Lettre ouverte envoyée
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