Voici quelques histoires d’environnement. Elles constituent des pièces essentielles de la grande histoire qui raconte comment, dans la plus parfaite bonne conscience, nous appauvrissons la biosphère. Ici, pas de conférence internationale, peu d’articles scientifiques, quelques rapports négligés, le désintérêt des médias : on détruit silencieusement.
Tiens, par exemple, c’est en Isère, dans le massif forestier des Chambarans, que l’entreprise Pierre & Vacances veut construire un village de loisirs - il faudra défricher et artificialiser quelques dizaines d’hectares. Ici, c’est dans le Jura que la petite commune de Damblans veut étendre une zone d’activités économiques sur 12 hectares de bonnes terres agricoles - il y a deux ou trois de ces zones aux alentours, mais allez... Voici dans l’Allier, près de Moulins, le projet de Logiparc : on rêve de transformer 184 hectares de champs en une base logistique « au coeur de l’Europe  ».
Là -bas, à Clermont-l’Hérault, dans l’Hérault, un entrepôt géant de la grande distribution remplacerait 70 hectares de vignes et de vergers. En Seine-et-Marne, près de Disney, Pierre &Vacances - encore ! - voudrait édifier des « villages nature  » sur 570 ha de l’excellente terre de Brie - bon, on commencera avec 175... Près de Nantes, le projet de Notre-Dame-des-Landes - qui accède peu à peu à la visibilité, grâce à l’énergie de ceux qui s’y opposent - transformerait plus de 1 300 ha de bocages en un aéroport de plus.
La liste n’est, hélas !, pas exhaustive. Dans chaque cas, quelques points communs. Le projet est vendu grâce à de mirifiques promesses d’emplois qui font oublier le dégât environnemental. L’examen des dossiers tempère beaucoup la force des promesses. Mais, deuxième point, les arguments des opposants se heurtent presque toujours à une alliance UMP-PS, qui forme un mur presque infranchissable : si, au niveau national, ces partis paraissent s’opposer, quand il s’agit de transformer la terre agricole en surface bétonnée, la bonne entente est de règle.
Enfin, le projet s’habille toujours de « développement durable  » : Pierre &Vacances opérera un « tourisme durable  », Logiparc se « crée dans un concept de développement durable  », et Nantes Métropole, qui promeut avec ardeur la création de l’aéroport à Notre-Dame-des-Landes, se vante d’être plus verte que Vert. Son vice-président, Ronan Dantec, est à Cancun, au Mexique, afin de chercher dans les mécanismes des traités sur le climat « la possibilité de nouveaux financements de l’action des villes et des collectivités territoriales  ». Ô développement durable, que de crimes on commet en ton nom !
Hervé Kempf
L’article en question est également consultable sur ReporTerre : http://www.reporterre.net//spip.php?article1464