Les années se suivent … et se ressemblent !
Je retrouve un courrier envoyé à André Vallini le 20 juillet 2010, concernant la biodiversité dans le département. J’y exprimais mon étonnement devant la contradiction entre l’analyse pertinente faite dans le numéro 110 de “Isère Magazine†, et le soutien financier que le conseil général veut apporter au projet de “Pierre et Vacances†de créer un “Center Parcs†à Roybon.
Je lis dans le numéro d’Isère Magazine N° 118 le même type de discours. Serge Revel, vice président du conseil général chargé de l’environnement, nous propose une cinquantaine de mesures sous le titre “et si vous changiez votre façon de vivre†. Le soutien au Center Parcs n’est pas remis en cause. Cette attitude ne m’amuse vraiment plus.
On nous dit que je dois économiser l’eau.
“Aussi j’ai accumulé des seaux de différentes tailles pour entreposer les eaux usées de cuisine et en arroser les plantes de la terrasse. Je me lève tôt le matin, et reste tard le soir au jardin pour arroser les aubergines. Corvées. Mais je pense qu’il faut «  arroser malin†. Soit.
Mais, si on laissait faire, Center Parcs puiserait 15% d’eau potable en plus dans la Bièvre ! :
1 Une consommation excessive d’eau potable :
L’enquête de la direction régionale de l’environnement du 16 mars 2010 note que c’“est un parc de loisir en grande partie lié à l’eau†. On évalue la consommation à 1200 m3 par jour soit 240 litres par habitant, la moyenne nationale étant de 180 litres. Le prélèvement, sur l’ensemble du bassin de Bièvre-Liers-Valloire, ferait augmenter la demande en eau potable de 15%, alors que depuis plusieurs années Bièvre-Valloire est déclarée en zone sécheresse.
2 La destruction des zones humides :
Le rapport de Pierre et Vacances, qui était consultable en mairie, reconnaissait que “l’hydrogéologie du plateau est mal connue†. On sait cependant que 62 hectares de zones humides seraient détruites alors que leur préservation et leur gestion durable  “sont d’intérêt général†. Le plateau de Chambarans, où se situerait le Center Parc, est considéré comme “une zone d’alimentation majeure† de la nappe aquifère qu’il recouvre. Les habitants de la vallée de l’Herbasse, et des autres cours d’eau, seront contents d’apprendre que l’on cherche, un peu partout dans le département de l’Isère, des mesures compensatoires à la disparition de cette zone humide dont ils subiront les conséquences. De qui se moque-t’on en voulant reconstruire ailleurs un écosystème que la nature à mis des milliers d’années à construire ?
3 La menace sur les rivières de l’Herbasse et de la Galaure :
Des prélèvements industriels et agricoles nuisent déjà gravement à ces deux rivières, lieux de vie d’espèces protégées. Dans une lettre au conseil général de la Drôme, les fédérations départementales de pêche de la Drôme et de l’Isère s’inquiètent : “Des perturbations mal évaluées sur le massif des Chambarans affaibliront encore davantage les étiages déjà sévères de la Galaure et de l’Herbasse†.
Certes, les eaux usées de Roybon, insuffisemment traitées, ne seront plus envoyées dans la Galaure où elles entraînaient un risque de pollution. Mais elles n’y seront plus rejetées du tout ! Avec celles du Center Parc elles seront envoyées dans l’Isère par une canalisation de 27 kilomètres ce qui créérait, dans les secteurs traversés, “des impacts non négligeables sur les aspects faune, flore et milieux humides†peut-on lire dans une étude sur la station d’épuration envisagée par le SIVOM de St Marcellin. Quant au rapport régional, il remarque qu’en raison de la faiblesse des débits d’étiage, tous les cours d’eau seront concernés car ils sont sensibles aux pollutions diverses, même faibles.
L’enquête sur l’eau, capitale pour ce site, n’est pas encore faite.
On nous dit que “je dois économiser toutes les sources d’énergie†. Aussi,
j’achète des lampes “basse consommation†, je les dépoussière soigneusement ainsi que les abat-jour, j’éteins « systématiquement la lumière quand je quitte une pièce », je ne laisse pas mes appareils en veille, je n’ai pas de climatiseur, je lave le linge à 40 degrés. Je peux accumuler ainsi les exemples de bonne consommatrice que je suis. En hiver, cependant, la température chez moi dépasse les 19 degrés, - il ne faut quand même pas exagérer ! – Mais j’ai diversifié les sources d’énergie : électricité, mazout et bois. J’ai fait installer un nouvel insert, soit disant plus performant : consommant moins de bois et polluant moins. Soit :
Mais, “Center Parcs†serait grand consommateur d’énergie.
Dans le protocole d’accord, signé entre le département et Pierre et Vacances en 2009, outre les cottages, 42 hectares d’équipements de loisir et de services sont programmés. On trouve, entre autres, un “Market dôme†, une halle de sport, une zone de restaurants et même un “ pôle de divertissement nocturne†.
1 L’aquamundo de 9000 mètres carrés, serait chauffé à 29 degrés, hiver comme été :
Mais c’est surtout cette piscine qui fait le succès de ce type de tourisme. Equipements aqualudiques au milieu de plantes tropicales, l’ensemble est chauffé toute l’année à 29. Nous voilà loin des 19° de nos appartements ! Quelle quantité d’énergie pour chauffer un pareil espace alors que dans les Chambarans les températures hivernales sont très inférieures à zéro et ce, pendant plusieurs jours ? 79/100 de l’énergie totale nécessaire seraient utilisés pour cet espace, dit le rapport de Pierre et Vacances qui était consultable en mairie. Les sources énergétiques seraient diversifiées : gaz, électricité et surtout bois, l’utilisation de l’énergie solaire étant impossible en raison de la topographie du site. Pierre et Vacances envisagerait même de demander des subventions à la région et à l’ADEME pour l’utilisation du bois !
2 Les cottages :
Mille cottages, de 79 à 168 mètres carrés, représentant une surface de 85 hectares, abriteraient environ cinq mille personnes, plus que Beaurepaire qui, en 2007 avait 4360 habitants. C’est une une ville, avec tous les problèmes que cela entraîne : l’imperméabilisation du sol et l’évacuation des eaux pluviales, l’élimination des déchets, l’éclairage, même si Pierre et Vacances prévoit des lampes basse consommation et des contrôles divers évitant, par exemple, que les cottages soient éclairés en l’absence d’habitants. C’est le moins qu’on puisse demander ! Cottages et équiments de loisirs ne seront pas climatisés : au milieu des bois, à 600 mètres d’altitude, ce ne sera guère nécessaire en effet !
3 Les touristes :
Mais contrôlera-t’on que les habitants n’oublient pas d’éteindre la lumière lorsqu’ils sortent d’une pièce ? Qu’ils ne laissent pas leurs appareils en veille ? Qu’ils ne prennent pas plusieurs bains par jour ? Il y a, en effet des baignoires dans les salles de bain, dont certaines à remous. Un bain consomme de 150 à 200 litres d’eau. Loin de moi l’idée de vouloir imposer des mesures drastiques à des touristes qui auront payé une somme très importante pour venir se ressourcer dans ce qui peut leur paraître comme un havre de paix au milieu de la nature. Un week end au Lac d’Ailette, dans un cottage “comfort style†, coà »te 645 euros pour quatre personnes. En 2011 le montant du RSA pour un couple est de 700,49 € mensuel.
On nous dit que je dois privilégier les transports en commun.
Aussi je devrais être honteuse chaque fois que je prends ma voiture en pensant à la quantité de CO2 que j’émets, et à la planète que je menace. Ne parlons même pas de la balance commerciale que je mets en déficit en consommant du pétrole acheté à l’étranger. Je pourrais rester dans mon village puisqu’aucun transport en commun ne me permet de le quitter, mais j’ai le tort d’avoir quelques activités à Grenoble. De même alors que “l’Isère est un si beau département†il m’arrive de le quitter pour aller en vacances ailleurs. Soit.
Mais, deux fois par semaine, 2000 véhicules conduiraient les clients au Center Parc ! D’où :
1 La pollution accrue :
Mille cottages c’est approximativement 5000 personnes. Les séjours durent entre trois et quatre jours. Les arrivées se font entre 14 et 22 heures, les départs entre 8 et 15 heures, il y a 220 véhicules heure. Ce seraient donc quinze cents à deux milles véhicules, qui, deux fois par semaine, conduiraient les touristes sur des routes particulièrement inadaptées à un trafic intense.
Si les Isérois sont invités à rester faire du tourisme chez eux, Belges, Hollandais, Allemands et compatriotes français des autres départements, viendraient à Roybon. Tant mieux pour eux c’est une belle région à découvrir. Cela veut dire des transports en avion, - dont on dit qu’ils sont les plus polluants - en train peut-être, ce qui serait l’idéal mais les gares sont éloignées de Roybon. Ce seront plus sà »rement des voitures avec toute la pollution accrue que cela entraîne. Le rapport régional s’en inquiète de même qu’il s’étonne qu’il n’y ait pas «  d’éléments sur la pollution générée par le chauffage des bâtiments « . La combustion du bois, avec l’émission de particules fines, est mise en cause dans la pollution des villes, en particulier Grenoble.
2 Le bruit :
Mais le trafic intense – n’oublions pas que outre les véhicules des touristes il y aurait ceux des travailleurs du site et des fournisseurs – entraînerait aussi d’importantes nuisances sonores. La déviation longerait l’établissement hospitalier EHPAD, ainsi que de multiples habitations qui actuellement poussent, comme champignons à l’automne, le long de la RD 71. Le rapport régional constate que, dans ce secteur hautement sensible, les analyses sonores n’ont pas été faites.
3 Les risques d’accidents :
Les routes du plateau de Chambaran n’ont jamais été conçues pour un tel trafic : elles sont étroites, tortueuses et ont tendance à s’effondrer. Sur la route qui conduirait de Roybon au Center Parc deux véhicules ne se croisent qu’avec difficultés et prudence. Il n’est pas rare qu’un «  ru  », retrouvant un ancien parcours, vienne décharger son stock de pierres sur la chaussée. Il y a aussi les vaches et les tracteurs. Car, il y a encore des fermes à Roybon et pas seulement l’étable et mini ferme de 430 mètres carrées ou la ferme des enfants de 1200 mètres carrés que Center Parc installerait sur le site des Avenières. Ne parlons pas de l’hiver où, malgré l’important et efficace travail des ouvriers des Ponts et Chaussées, quelques voitures se retrouvent dans le ravin, lorsque des intrépides ont voulu assurer leur travail au lieu de rester au chaud sous la couette.
4 Les propositions de Pierre et Vacances concernant “la réduction de l’impact carbone lié au transport …†:
Les solutions sont évoquées dans le protocole d’accord :
 “ Pour les vacanciers : l’accès au site ( navette gare-center parc ) sera étudié par Pierre et Vacances et pourra faire l’objet d’une offre particulière ….. ( à valider en fonction des résultats sur la pertinence de cette offre d’un point de vue marketting†.
 “ La desserte locale ( excursions à la journée …) sera étudiéeâ€
“ la location de véhicules électriques pourra être envisagée …â€
C’est moi qui souligne. Nous voilà pleinement rassurés. Dans ce domaine comme dans d’autres, le souci du “développement durable† de Pierre et Vacances est manifeste.
On nous dit que «  je dois changer ma « façon de vivre « : aussi
Je dois, pour cueillir les fleurs, “avoir la main légère†, pratiquer le compostage ou le lombri-compostage ; construire ou acheter des nichoirs ; nourrir les oiseaux et les protéger de tout ce qui les menace ; je dois agir ou militer dans ma commune pour l’abandon des pesticides et la gestion raisonnée des espaces verts ; je dois planter des haies. Soit.
Mais, Pierre et Vacances pourrait détruire 200 hectares d’espaces vierges et
1 Des espèces menacées :
La forêt des Avenières, vierge d’activité humaine, est un espace riche de sa bio diversité. Si Center Parcs s’y implantait, la bécasse ne pourrait plus hiverner dans ces bois. L’espèce écrevisse à pieds blancs risquerait de disparaître définitivement. S’il semble n’y avoir qu’une seule espèce végétale protégée sur le secteur – l’inule de Suisse – quarante quatre espèces animales protégées : chauves souris, tritons et salamandres, écureuils roux, reptiles, et surtout oiseaux, dont une trentaine d’espèces font leur nid sur le site, vivent dans ce bois. Que deviendront-elles ?
Le site du projet constitue «  une aire de refuge importante pour les chevreuils, sangliers et cerfs «  Où iront-ils ?
2 Des couloirs biologiques :
Dans le numéro 119 d’Isère Magazine, le conseil général, nous apprend qu’il a été récompensé pour son action en faveur des couloirs biologiques. Il remet en jeu la somme de 5000 euros qu’il a reçue. Elle récompensera le ou les gagnants d’  » un grand concours ouverts à tous … particuliers, associations, petites communes … présentant un projet favorisant le passage des animaux à travers les routes, les bois et les champs …. « Comment n’aurions-nous pas l’impression d’être pris pour des imbéciles ? Le conseil général soutient le projet de Center Park. Outre les frais d’infrastructures il va verser sept millions d’euros de subventions aux acquéreurs de cottage, soit 7000 euros pour chaque propriétaire. Ce sont des propriétaires qui peuvent quand même payer 260 000 euros pour un cottage meublé de trois pièces, le moins cher. Le grillage de cet espace clos constituera une barrière infranchissable, - pour les hommes, c’est son but, mais aussi pour les animaux. - Le plateau de Chambaran permet «  la circulation des animaux entre les massifs du Vercors et du Pilat et les forêts du Bas Dauphiné. «  On va leur faire un tobogan pour qu’ils puissent passer au dessus de la clôture du site touristique ?
Les automobilistes ont coutume de rencontrer, en traversant les Chambarans, cerfs, chevreuils, sangliers. Ne parlons pas des faisans, lièvres et lapins. J’ai suivi l’un d’eux, en voiture, de nombreuses minutes : pris dans les phares il restait sur la route, je n’avais pas envie de l’écraser, et … en plus c’était dangereux. On va faire des tunnels et des ponts ? Pour les animaux ou pour les touristes ?
3 Des habitats naturels :
Deux habitats : la Chênaie-Boulaie et l’Aulnaie-Saulaie «  atteignent une valeur floristique relative qualifiée de très forte, voire remarquable. «  Que vont-ils devenir ?
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Souvenons-nous !
En 1294, le dauphin Humbert I accordait une charte de franchise, aux Roybonnais. Dans cet acte il les autorisait à jouir librement et paisiblement des bois et “pasquerages†. Depuis cette époque et pendant des siècles, les Roybonnais se sont battus pour conserver cette richesse : leurs bois. Contre les verriers qui les brà »laient pour entretenir leurs fours, contre les communautés voisines qui dépassaient les limites, contre les seigneurs qui voulaient spolier les habitants, ils ont engagé des procès. Au 19ème siècle, c’est Saint Romme, avocat qui les a défendus.
Pendant la guerre 39-45, les bois de Roybon, ont été lieu de refuge pour les réfractaires au STO.
Les Avenières, espace de liberté pour les réfractaires, le restent pour les Roybonnais mais aussi pour tous ceux, qui, de Grenoble et au-delà , viennent, selon la saison, cueillir le muguet, les champignons, le houx ou simplement se promener. Un mirador se dressait au milieu de cette forêt qui est encore la propriété des Roybonnais, n’est-ce pas un sinistre présage de ce qui pourrait devenir un espace concentrationnaire de luxe ?
Accepterons-nous que Pierre et Vacances, et les autres entreprises touristiques, qui ont bétonné la mer et la montagne, entraînant ainsi des dommages irrémédiables, détruisent aujourd’hui la campagne ?