M Buisson tente de nous rassurer sur le faible impact qu’aurait, selon lui, l’implantation du center-parc sur le site des Chambaran, dont le terrain « imperméable  » constituerait une sorte de garantie « tous risques  » empêchant toute pollution.
Ce n’est pourtant pas ce qui ressort de l’étude menée par l’office national de l’eau et des milieux aquatiques (ONEMA) qui, dès 2010 [1], a pointé de nombreux manques et approximation dans le projet de « Pierre et Vacances  ».
On citera, pour mémoire, l’absence d’un véritable état des lieux du bassin amont de l’Herbasse, le plateau des Chambaran constituant « une des zones d’alimentation pluviale privilégiée de l’aquifère de la molasse-miocène du Bas-Dauphiné (…), la perte d’environ 70 ha de zones humides contribuant à la recharge de la nappe molasse-miocène et au soutien d’étiage de l’Herbasse  ». L’Herbasse, le Valéré, la Galaure, l’Aigue noire et le Gerbert ont été classés en réservoirs biologiques, dans le cadre du schéma directeur d’aménagement et de gestion des eaux Rhône-Méditerranée (SDAGE) 2010-2015, qui définit « l’aquifère molassique comme une ressource majeure, d’enjeu régional, vulnérable et à préserver pour les générations futures  ».
Tout aussi préoccupantes sont les observations de l’ONEMA sur la disparition de 70 ha de zones humides (en fait 110 à 120 ha selon les experts indépendants mandatés par l’enquête publique), qui « induit des impacts directs sur les niveaux d’étiage de cours d’eau dont elles assurent le soutien sur un bassin versant dont le déficit a été confirmé par l’étude sur les volumes prélevables, ainsi que sur l’alimentation de la nappe souterraine de la molasse-miocène (…)  »
Quant au niveau de compensation proposé (pour mémoire, sur 8 départements, la remarque est sans appel : « (…) cette option ampute la région d’une capacité de réponse non négligeable à des besoins de compensation déjà pressentis pour de futurs projets publics  ».
Suivent des nombreuses remarques sur le sous-dimensionnement des installations prévues pour capter et canaliser les eaux pluviales, ainsi que sur les risques de pollution des cours d’eau du bassin versant par les eaux de vidange des « cottages  » et de la « bulle tropicale  ».
Il est donc tout à fait faux de prétendre que le projet n’aura aucun impact sur l’environnement, au prétexte qu’il se situe dans une « forêt de faible valeur  ». La valeur d’un territoire ne se mesure pas au seul prix de vente de quelques coupes de bois, dans une vision utilitariste de la nature. Elle s’inscrit au contraire dans une approche globale, inscrite dans la loi : « l’eau fait partie du patrimoine commun de la nation. Sa protection, sa mise en valeur et le développement de la ressource utilisable, dans le respect des équilibres naturels, sont d’intérêt général  » (art. 210-1 code de l’environnement).
Faut-il enfin rappeler que le projet a fait l’objet d’un avis défavorable (à l’unanimité) de la commission chargée de l’enquête publique, du 14 avril au 28 mai 2014 ?
Dans une seconde partie, Monsieur Buisson reprend le discours désormais bien rôdé des élus du département et d’une partie des communes concernées sur les emplois attendus .
Mais de quoi parle-t-on ?
Si l’on regarde les chiffres des autres center-parcs implantés en France, seule la moitié des emplois promis sont des emplois directs. Les autres sont confiés à des sous-traitants qui ne sont pas liés par l’engagement de « Pierre et Vacances  ». Un quart de ces emplois sont des CDD, le reste étant constitué de CDI à temps très partiel, à 319 € par mois [2]. Le groupe s’engage à privilégier les embauches locales. Excellent ! Mais qui empêchera les sous-traitants d’embaucher sur le marché européen, de préférence à bas coà »t, et en l’absence de tout contrôle réglementaire ? En Lorraine, le center-parc après avoir externalisé le nettoyage, a fait de même avec la restauration. Ainsi, deux personnes sur trois travaillant dans un center-parc ne seraient pas salariées du groupe. Où sont donc les emplois « non-délocalisables  » ?
Plus grave, ces emplois sont largement et doublement financés par le contribuable, au travers des subventions votées ou à venir par les collectivités, mais aussi par la fiscalité très favorable qui s’applique à l’immobilier locatif (loi Censi Bouvard prolongée par Mr Cahuzac).
Détruire, au nom de l’intérêt publique, un patrimoine naturel, bien commun, avec de l’argent public, au bénéfice d’un groupe privé qui accumule les pertes d’exploitation, c’est apparemment la seule conception de l’aménagement du territoire qu’ont les élus locaux. Ce n’est en tous cas pas celle de nombreux citoyens de ce pays, qui expriment désormais haut et fort leur désaccord et leur volonté d’être enfin entendus !
Michel Pierre – Saint-Lattier